Pierre Vermeren : «C’est à l’Élysée que se trouve la clef de la situation» avec le Maroc

Pierre Vermeren, spécialiste du Maghreb, a indiqué lors d’un récent entretien qu’Alger «oppose un refus catégorique à Paris en ce qui concerne une éventuelle réconciliation». Il ajoute que la France «a été sortie de toutes les grandes affaires [algériennes], sauf la politique des visas et la question mémorielle.» Néanmoins, la France veut renouer avec le Maroc, toute la question est de savoir quelle place elle y voudra tenir et quel rôle elle y saura jouer.

«Les Marocains considèrent que la France sous Macron a tourné le dos à son plus vieil et plus fidèle allié» : dans un récent entretien, Pierre Vermeren, historien français spécialiste du Maghreb, qui a affirmé que le «refroidissement entre la France et le Maroc est une réalité depuis plusieurs années», pointe du doigt la singulière illusion française dans ses rapports avec l’Algérie, laquelle pousse Paris dans d’inexplicables contradictions. «Au départ, il y a la politique de réconciliation de Hollande avec l’Algérie, reprise par le président Macron. Chirac et Sarkozy voulaient aussi faire un traité de l’Élysée avec l’Algérie comme avec l’Allemagne. Mais ils se sont rendu compte qu’Alger n’en veut pas», relève M. Vermeren avant d’établir un constat atterrant : «la France a été sortie des grandes affaires, les contrats pétroliers, d’armement, d’infrastructures. Ce sont les Russes, les Chinois et même les Allemands qui se partagent les affaires sérieuses. Les Français sont cantonnés aux visas et à la question mémorielle, comme le dit un ancien ambassadeur à Alger. Mais même si ces questions étaient réglées, ils n’ont plus besoin de nous.»

Le Maroc, seul allié fiable

Le plus important des points obscurs dans les relations entre Rabat et Paris semble être justement le changement soudain de la politique française et les causes qui peuvent l’avoir déterminé. «C’est à l’Élysée et au palais royal marocain que se trouve la clef de la situation», reconnaît-il, faisant valoir que «le Maroc n’est pas dans la même position de fermeture algérienne». «Une des conséquences de notre politique avec l’Algérie est d’avoir déclenché le mécontentement des Marocains, à laquelle se sont ajoutées les mauvaises relations personnelles entre le roi [Mohammed VI] et le président Macron. L’élite marocaine considère en général que la France n’a rien retenu de l’histoire, qu’elle se fait des illusions sur l’Algérie alors qu’elle n’est pas fidèle son Vieil ami marocain. Que notre pays se ridiculise à vouloir faire des concessions qui ne lui rapporteront rien. Et qu’elle perd de ce fait un allié solide et fiable», constate M. Vermeren.

Au Sahel, «les Marocains finalement s’engouffrent dans la place vide laissée par la France», a-t-il renchéri, rappelant la position stagnante française relative au dossier du Sahara alors que les Marocains prennent à cœur les points qui portent atteinte aux droits souverains du pays.

Le chef de la diplomatie française, Stéphane Séjourné, a réitéré, le 26 février, le soutien «clair et constant» de Paris au plan d’autonomie marocain du Sahara, assurant vouloir progresser sur ce dossier, lors d’un déplacement très commenté à Rabat. «La question du Sahara, c’est un enjeu existentiel pour le Maroc, nous le savons», a déclaré M. Séjourné lors d’une conférence de presse au côté de son homologue, Nasser Bourita.

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