Selon un nouveau rapport de la Cour des comptes européenne, l’appui budgétaire accordé par l’Union européenne (UE) au Maroc entre 2014 et 2018 n’a apporté qu’une faible valeur ajoutée aux secteurs couverts par son soutien financier et n’a guère permis de soutenir les réformes.
La valeur des contrats conclus entre le Maroc et l’Union européenne et des paiements effectués dans tous les secteurs couverts par l’appui budgétaire entre 2014 et 2018 s’élève respectivement à 562 millions d’euros et à 206 millions d’euros. L’aide de l’UE a été axée sur des questions transversales. Toutefois, peu d’améliorations ont pu être observées selon le rapport de la Cour des comptes européenne.
Au total, l’appui budgétaire de l’UE en faveur du Maroc a représenté environ 0,37% des dépenses budgétaires globales du pays entre 2014 et 2018. Les secteurs concernés sont ceux de la santé, de la protection sociale, de la justice et du développement du secteur privé. Selon la Cour des comptes européenne, l’appui budgétaire de l’UE « n’a pas permis de soutenir suffisamment les réformes et peu de progrès ont été accomplis en ce qui concerne les principaux enjeux » étant donné que la conception des programmes d’appui budgétaire et de leurs indicateurs présente plusieurs faiblesses.
Par ailleurs, la Cour des comptes européenne note que les programmes d’appui budgétaire ont été en adéquation avec les stratégies sectorielles du pays, mais ces stratégies ne sont pas toutes accompagnées de valeurs cibles chiffrées pour les objectifs spécifiques ou les plans d’action. Par conséquent, les valeurs cibles des programmes d’appui budgétaire ne pouvaient pas toujours être comparées aux valeurs cibles sectorielles nationales. De plus, sur 86 valeurs cibles de l’appui budgétaire, 25 n’étaient pas assez ambitieuses pour soutenir les réformes annoncées par le Maroc. En outre, la Cour européenne relève que certaines difficultés signalées par différentes parties prenantes dans plusieurs secteurs tels que la santé et l’éducation n’ont pas été directement prises en compte lors de l’élaboration du programme d’appui budgétaire. Elle a également observé un retard quant à la mise en oeuvre de certaines réformes.
Dans son rapport, la Cour européenne des comptes audite ainsi la manière avec laquelle la Commission européenne gère les fonds communautaires et dépense l’argent destiné notamment au soutien octroyé au Maroc dans différents domaines. Toutefois, le titre du rapport « Soutien de l’UE en faveur du Maroc : peu de résultats à ce jour » prête à confusion et présente les choses comme s’il s’agissait d’un manquement à ses engagements vis-à-vis de son partenaire européen. Il appelle à une révision de la gestion par la Commission européenne des fonds communautaires, non pas à l’égard du Maroc, mais plutôt au recours à l’appui budgétaire de manière générale.
Soulignons que le Maroc a suspendu le dialogue politique avec l’UE entre décembre 2015 et janvier 2019 à la suite de l’arrêt rendu par le Tribunal de l’Union européenne en décembre 2015 concernant le Sahara marocain, selon lequel la Cour de justice de l’Union européenne a estimé que l’application de l’accord agricole Maroc-UE aux provinces du Sud « est contraire au principe de droit international ». Ainsi, la Commission européenne n’a pas pu disposer de données durant cette phase afin de mesurer les réformes menées par le Maroc et pour déterminer réellement si l’appui budgétaire de l’UE « n’a pas permis de soutenir suffisamment les réformes » au Royaume. Evaluer ainsi les réformes entreprises au Maroc durant cette période de froideur met en doute la crédibilité du rapport et laisse croire que ce sont des conflits internes entre les institutions européennes qui sont à l’oeuvre du positionnement du Maroc comme étant un pays qui n’a pas pu progresser en l’espace de 4 ans.
Il faut savoir que le Maroc a précédemment anticipé les conclusions de ce rapport de la Cour des comptes en demandant à maintes reprises à l’UE de refonder ses instruments financiers d’intervention, de les adapter aux ambitions du Royaume et de renforcer leur efficience et ce, dès le lancement de la Politique européenne de Voisinage en 2003. Cette orientation explique en partie le choix du Maroc d’engager un processus de réflexion en profondeur sur son partenariat avec l’UE comme en témoigne la tenue de la retraite de Skhirate de juin dernier.
Rappelons que Federica Mogherini, ex-représentante de l’UE pour les affaires étrangères, a salué les profondes réformes socio-économiques au Maroc dans un contexte de stabilité sous l’impulsion du Monarque lors de la 14ème Session du Conseil d’Association Maroc-UE tenue le 27 juin dernier à Bruxelles. « Ses vingt années de règne [NDLR : règne du Souverain] ont permis au Maroc d’approfondir son partenariat avec l’Union européenne tout en jouant pleinement son rôle à l’échelle du continent africain et sur la scène multilatérale et bien sûr régionale, en particulier dans le nord de l’Afrique et le monde arabe », a-t-elle observé. D’ailleurs, plusieurs pays européens ont souligné, à maintes reprises, que le Maroc est un partenaire stratégique pour l’UE tout en mettant en exergue les réformes et les avancées qu’il a su réaliser ces dernières années.