Le débat sur le préambule du projet de loi organique sur la grève ravive les tensions au Parlement

La controverse sur la préambule du projet de loi organique sur la grève a une nouvelle fois enflammé les débats, vendredi, au sein de la Commission de l’enseignement et des affaires culturelles et sociales de la Chambre des conseillers. Alors que les représentants du mouvement syndical persistent à exiger son inclusion dans le texte en cours d’adoption, le gouvernement campe sur sa position, invoquant des impératifs procéduraux.

Face à l’insistance des syndicats, le ministre de l’insertion économique, de la petite entreprise, de l’emploi et des compétences, Younes Sekkouri, a tenté d’apaiser les tensions en proposant un compromis : le retrait des amendements relatifs au préambule par la majorité en échange d’une consultation juridique permettant aux conseillers de soumettre de nouvelles propositions lors de la séance plénière.

Toutefois, la commission a tranché en faveur du gouvernement, rejetant les amendements introduits par l’Union marocaine du travail (UMT), la Confédération démocratique du travail (CDT) et l’Union nationale du travail au Maroc (UNTM). Le vote s’est soldé par onze voix contre, quatre en faveur et deux abstentions.

Dans un plaidoyer en faveur d’un règlement apaisé de la controverse, le ministre Sekkouri a estimé que le débat méthodologique avait été suffisamment approfondi et a assuré que le texte, une fois adopté, serait soumis au contrôle du Conseil constitutionnel. “Il n’y a plus de divergence fondamentale sur le fond. Nous avons fait preuve d’une grande souplesse dans la discussion et la formulation du texte ne pose pas de problème insurmontable”, a-t-il déclaré, ajoutant que “toutes les versions proposées restent dans le cadre de ce que le gouvernement peut accepter”.

Le gouvernement peine à contenter les syndicats

Le ministre a ainsi suggéré une consultation strictement juridique – et non politique – sur la question, rappelant que “le préambule obéit à des normes précises”. Il a défendu une approche procédurale rigoureuse, estimant qu’il convenait de respecter le cadre législatif en vigueur. “Les amendements de la majorité doivent être retirés, mais nous nous engageons à examiner toute nouvelle proposition en séance plénière, conformément à l’article 83 de la Constitution”, a-t-il précisé.

Du côté des syndicats, la résistance demeure. La CDT a rejeté toute volonté d’obstruction partisane, insistant sur l’importance d’un cadre législatif équilibré et protecteur des droits des travailleurs. “Nous ne sommes pas dans une opposition systématique. Ce texte régira l’exercice d’un droit fondamental et façonnera l’image du Maroc auprès de l’Organisation internationale du travail (OIT), influençant sa capacité à attirer les investissements étrangers. Or, il est facile de légiférer dans une logique autoritaire”, a-t-il averti.

“L’objectif est de produire une loi digne des générations futures”, a poursuivi la centrale, insistant sur l’impératif d’intégrer le préambule ou, à défaut, ses principes fondamentaux dans l’article premier du projet de loi. “On ne peut légiférer sur le droit de grève sans tenir compte de l’article 87 de la Constitution. Seuls ceux qui ont des choses à cacher craignent la grève. Ceux qui respectent la loi n’ont aucune raison de s’en inquiéter”, a-t-il asséné, pointant du doigt la précipitation du gouvernement dans le traitement du texte, qui aurait mis les parlementaires sous pression.

Même son de cloche du côté de l’UNTM, qui a réitéré la nécessité d’un préambule pour un texte dont les implications dépassent le cadre strictement national. “Ce projet de loi est scruté par les organisations internationales et les institutions de défense des droits humains. Tous attendent son adoption. Nous n’allons pas rouvrir le débat. Ce vendredi est un jour décisif : soit nous avançons, soit nous faisons marche arrière”, a-t-on clamé.

Alors que la séance plénière s’annonce sous haute tension, le gouvernement tente de préserver un équilibre délicat entre attachement aux procédures et prise en compte des revendications syndicales. La question du préambule cristallise une opposition de fond entre une vision strictement légistique du droit de grève et une approche plus ouverte aux engagements internationaux marocains, alors que M. Sekkouri peine à concilier les contraires.

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