La relance de l’économie marocaine freinée par la sécheresse et le coronavirus

L’activité économique nationale va connaître un net ralentissement en 2020. Le HCP prévoit une baisse de la croissance économique sous le double impact de la sécheresse et du coronavirus.

La croissance économique du Maroc devrait être revue à la baisse à près de 2% en 2020, contre une prévision initiale de 3,5% en raison de la sécheresse qui a réduit la production agricole et une forte baisse des arrivées de touristes en raison de l’épidémie du coronavirus.

L’alerte sur la croissance économique a été lancée par le patron du HCP, Ahmed Lahlimi. D’après lui, l’économie marocaine s’apprête à connaitre cette année son pire taux de croissance depuis vingt ans. « Nous continuons à évaluer une situation en évolution rapide (…) Les conditions actuelles suggèrent que nous nous acheminons vers la plus faible croissance des vingt dernières années », a-t-il déclaré.

Pour Driss Effina, professeur d’économie, l’économie nationale n’aura droit qu’à un modeste rebond en 2020. Et seulement si elle parvient à éviter les nombreux pièges qui se dresseront sur son chemin. Les cieux n’ont pas été très généreux cette année et les conditions actuelles suggèrent que nous sommes en trajectoire pour la plus faible croissance en deux décennies. Ainsi, les prévisions de croissance économique au Maroc en 2020 ne sont plus d’actualité. « L’année 2020 sera très difficile sur le plan économique. Le Maroc est aujourd’hui appelé à jouer le tout pour le tout pour faire repartir sa croissance qui est, à l’heure actuelle, au bord de l’asphyxie », a-t-il indiqué à Barlamane.com/fr.

Selon l’expert, l’économie marocaine est extrêmement vulnérable et dépend de facteurs qui sont imprévisibles mais surtout externes tels que la pluviométrie, les rentrées de devise, les transferts des MRE et les recettes touristiques. Jusqu’à présent, les températures affichées par le thermomètre au Maroc, l’arrêt brutal des pluies et la hausse de la demande climatique des cultures installées engendrent un accroissement du besoin en eau, pendant cette campagne agricole. De plus, l’arrêt précoce de pluies suscite des craintes et inquiétudes qui commencent à prendre place dans les esprits des cultivateurs. Soulignons que le Maroc a basé son budget 2020 et ses prévisions de croissance initiale sur une campagne agricole moyenne de 70 millions de quintaux. Le manque de précipitations printanières pourrait signifier que la production céréalière du pays chuterait à 3 ou 4 millions de tonnes, ce qui l’obligera certainement à importer les céréales.

Par ailleurs, le Maroc continue à capter moins d’investissements étrangers sur son territoire. A fin janvier 2020, leur flux s’est inscrit en régression de 32,2% par rapport au niveau enregistré à la même période de l’année précédente. Ils ont, en effet, perdu 679 MDH de leur valeur revenant ainsi à 1,43 MMDH contre 2,11 MMDH à fin janvier 2019. Quant aux transferts des MRE, l’Office des changes souligne que janvier 2020 a été marqué par une légère baisse des envois de fonds des MRE. En effet, ces transferts ont reculé de 184 MDH atteignant dans ce sens les 5,26 MMDH contre 5,41 MMDH au même mois de l’année passée.

S’ajoute à ces facteurs, la crise épidémique, engendrée par la prolifération du coronavirus, qui aura des conséquences négatives sur l’économie mondiale, notamment nationale, au premier trimestre de 2020. Aujourd’hui, plusieurs entreprises sont à l’arrêt, les cours de la bourse plongent puis remontent timidement. La chaîne d’approvisionnement mondiale est elle aussi, grippée. Alors que le coronavirus s’étend dans le monde, la croissance économique est revue à la baisse.

Le coronavirus rend les perspectives concernant l’activité touristique en 2020 incertaines. Comme partout au monde, la menace du coronavirus aura un impact sur le secteur du tourisme au Maroc. En effet, 52.000 touristes chinois ont annulé leurs réservations au Maroc correspondant à février-mars 2020, soit 28.000 réservations annulées en février et 24.000, en mars. La crise du coronavirus va coûter très cher au secteur du tourisme au Maroc. Impossible de chiffrer exactement l’ampleur de la crise économique liée au coronavirus, tout simplement parce qu’on n’en connaît pas la fin. Mais le manque à gagner risque d’être très important, pour le secteur du tourisme. Rappelons que, par mesure de précaution, le Royaume a annulé tous les voyages en Italie. Une annulation qui aura certainement un impact négatif sur les recettes touristiques.

Soulignons que depuis l’éclatement de la crise du coronavirus, le prix du pétrole dégringole : le Brent et le WTI sont actuellement à leur niveau le plus bas depuis 2016. En principe, les prix à la pompe au Maroc, qui fait du cours du baril l’une des hypothèses de base pour ses prévisions de Loi de Finances, doivent baisser dans les jours à venir. Plusieurs professionnels du secteur redoutent une éventuelle baisse et même ceux qui misent sur une baisse des prix à la pompe, notamment M. Effina, pensent que les recettes budgétaires qui se découleront de ce fait ne seront pas suffisantes pour redresser la situation économique au Maroc.

Face à cette situation, l’Exécutif doit se préparer, prévenir et agir tôt. les cellules de crises se préparent en amont. « Cela doit être dans les veines des politiciens, qu’il s’agisse d’une pandémie, d’un choc climatique ou de tensions géopolitiques. Il faut engager des réformes structurelles pour que le Maroc puisse booster sa croissance économique et renforcer ses options stratégiques. Il faut aussi penser à une amélioration plus systématique du climat des affaires tout en encourageant les capitaux privés nationaux et internationaux à s’engager dans l’investissement productif », explique M. Effina.

A noter que le ministère de l’Economie, des Finances et de la Réforme de l’administration vient d’annoncer la mise en place d’un Comité de veille économique (CVE). Et ce, afin de suivre de près l’évolution de la situation économique au Maroc et l’impact du coronavirus sur la croissance de l’économie. Il est aussi question d’identifier les mesures appropriées en termes d’accompagnement des secteurs qui seront impactés par la crise épidémique.

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