Aziz Akhannouch a-t-il relégué Leïla Benali après ses réserves sur l’hydrogène vert ?

Longtemps perçue comme l’un des visages de la transition énergétique du Maroc, Leïla Benali semble désormais tenue à l’écart des arbitrages majeurs. Son absence répétée aux réunions stratégiques sur l’hydrogène vert, alors même que son ministère en est un acteur clé, alimente les spéculations. Si elle avait pris part au premier conclave, elle ne s’est plus manifestée par la suite, hormis lors d’une rencontre en août 2024 où elle s’était contentée de déléguer la représentation de son ministère à son secrétaire général. Ses déclarations prudentes sur la viabilité du projet ont contribué à accentuer son isolement. En parallèle, l’enlisement du dossier Noor 3, cette centrale solaire à l’arrêt qui pèse lourdement sur les comptes publics et sur ceux de l’opérateur saoudien Acwa Power, jette une ombre sur la gestion du secteur. Entre tensions politiques et défis énergétiques (et ambitions inavouées), la ministre semble plus que jamais fragilisée.

Leïla Benali a-t-elle subi «le césarisme» d’Aziz Akhannouch ? Le Maroc, déterminé à se faire une place de choix dans l’hydrogène vert, voit une de ses principales figures se retirer progressivement de la scène. Depuis le lancement du «projet hydrogène» en septembre 2023, Leïla Benali, bien qu’au cœur de ce projet, s’est peu à peu éloignée des réunions stratégiques. Après une participation initiale à la réunion fondatrice, elle n’a cessé de disparaître des délibérations suivantes, laissant son département dans l’ombre. Lors de la dernière rencontre de la commission de pilotage où cinq investisseurs ont été retenus pour développer six projets dans le Sud, la ministre n’a pas été représentée. La décision de confier cette tâche à d’autres départements souligne la place de plus en plus marginale occupée par Mᵐᵉ Benali dans le pilotage de la stratégie énergétique du royaume.

Une prudence qui dérange

Si son retrait ne relève pas uniquement d’une absence physique, les déclarations de Mᵐᵉ Benali ont également contribué à l’éloigner du centre du jeu politique. En janvier, face aux députés, la ministre avait clairement exprimé ses réserves concernant la compétitivité du projet d’hydrogène vert. «Le Maroc ne poursuivra pas cette voie si nous ne parvenons pas à produire de manière compétitive d’ici 2030», avait-elle averti, en décalage avec le discours du gouvernement qui mise, a-t-on confessé, sur cette filière comme levier stratégique de croissance et de souveraineté énergétique.

Mᵐᵉ Benali a également été interpellée sur la question de les retombées de la production d’hydrogène sur les ressources en eau du pays. Bien qu’elle ait défendu des «économies d’échelle» pour relativiser l’empreinte hydrique, son argumentation n’a pas suffi à dissiper les inquiétudes croissantes sur les risques d’une gestion insoutenable de l’eau.

L’enlisement du dossier Noor 3

L’un des points les plus sensibles demeure le dossier de la centrale solaire Noor 3 à Ouarzazate, un projet phare du Maroc en matière d’énergie renouvelable. À l’arrêt depuis plusieurs mois, cette centrale de 150 MW, qui devait symboliser l’excellence du royaume en matière de solaire thermodynamique, connaît un retard considérable. Selon le dernier rapport d’Acwa Power, l’opérateur saoudien, cette interruption prolongée a causé une perte estimée à 51 millions de dollars en 2024. Les causes de ce blocage restent floues et la reprise de l’activité ne devrait pas intervenir avant la fin du premier trimestre 2025.

Dans un contexte où le gouvernement cherche à rassurer investisseurs et partenaires internationaux sur la fiabilité de sa stratégie énergétique, l’effacement progressif de la ministre Benali n’est pas passé inaperçu. À l’approche des échéances électorales, son avenir au sein de l’exécutif semble de plus en plus brumeux, alors que le Rassemblement national des indépendants (RNI) d’Aziz Akhannouch ne fait plus mystère de sa volonté de présider le prochain cabinet, supposé veiller aux chantiers du Mondial-2030.

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