La crise du l’Union socialiste des forces populaires (USFP) est avérée, et de tous les horizons on parle de sa nécessaire refondation. Les contingences qui ont présidé au dernier remaniement ont affaibli considérablement la position de son secrétaire général, Driss Lachgar.
Les voix au sein de l’USFP sont unanimes : il faut rénover le parti, repartir sur de nouvelles bases, se ressourcer aux principes originels du parti, qui n’est pas «suffisamment de gauche», parce qu’il aurait révélé son «tropisme vers le courant libéral». L’existence de l’USFP serait en jeu.
Driss Lachgar est seul, ou presque. Son autorité est de plus en plus contestée au sein de son propre parti. Parce qu’il a dû composer avec une coalition variée, passer nombre de compromis avec ses supposés alliés au détriment de son parti. Cette position de funambule lui attire les foudres de ses propres partisans. L’USFP, se place aujourd’hui dans le gouvernement avec un portefeuille orphelin.
Les couloirs politiques et médiatiques, depuis le remaniement ministériel, bruissent de mille rumeurs sur la refondation de l’UFSP. Celui-ci est présenté comme connaissant une crise latente, risquant une nouvelle scission. Deux faits ont contribué au retour à une ligne de rupture : la nomination de Mohamed Ben Abdelkader, auparavant ministre délégué chargé de la Réforme de l’administration et de la fonction publique au portefeuille de la Justice dans la nouvelle mouture (le seul USFPiste au sein du cabinet El Othmani) ainsi que les compromis de Driss Lachgar, qui l’ont défiguré et enfoncé dans la marge.
Pour l’antenne régionale du parti à Agadir qui s’est rassemblée la semaine dernière à Agadir, une prise de distance historique, ainsi que l’inscription dans un renouvellement impératif est nécessaire. Tout commence lors des obsèques d’Abderrahmane El Azzouzi, ex-secrétaire général de la Fédération démocratique du travail (FDT) et co-fondateur de l’USFP, le 6 septembre. membres et ex-membres du Bureau politique de parti socialiste expriment la nécessité d’une réorientation urgente.
Mohamed El Yazghi, Taieb Mounchid, Tarik Kabbadj, Ahmed Reda Chami, entre autres, regrettent que l’USFP apparaisse comme un parti déraciné, au nombre d’adhérents réduit et aux réseaux syndicaux et coopératifs fragiles. Ils pointent surtout la difficulté pour Driss Lachgar à mesurer les enjeux politiques. Le secrétaire général de l’UFSP, en butte aux critiques sur le trop grand poids laissé au contingent, à l’événement, à l’intérêt, est en ligne de mire. La reconquête des couches populaires et revoir l’USFP comme un parti des masses se ferait sans lui, espère-t-on.
Trois grandes séries d’interrogations interpellent. La première porte sur le fonctionnement partisan de l’USFP, trop souvent réduit à la domination de l’appareil sur les militants. Or, au plus près du terrain, l’action des élus s’avère insuffisante, sans relief. Réda Chami choisi comme angle d’attaque la fonction de secrétaire général et approfondit la question du leadership. Driss Lachgar incarne-t-il suffisamment le parti qu’il dirige ? La deuxième série d’interrogations porte sur la culture militante socialiste. Entre signes d’appartenance communs et liberté laissée à chacun, l’esprit de l’USFP se trouve tiraillé entre différentes tendances.
La troisième série de préoccupations aborde le poids des événements et l’évolution des prises de position. Les positionnements des composantes internes au parti ainsi que l’effet-retard de la mutation, démontre que la «révolution» se fait ainsi attendre chez les socialistes à propos des questions organisationnelles et politiques.
Le conseil régional du parti, qui sera organisé en novembre, abordera l’avenir de l’USFP, sera capital. En interne, les acteurs qui se revendiquent socialistes, leur panthéon, leurs références, voir leur manière de militer son une source de confusion pour certains membres du bureau politique. Continuité et rupture sont ainsi interrogées.
De par son histoire, l’USFP a connu plusieurs fondations ou refondations, mais surtout, sa situation éclaire les oscillations d’une organisation née à l’orée de l’indépendance, constamment prise entre flux et reflux, tant dans le domaine des idées que dans celui des structures, de l’action ou des membres en constituant le tissu.